Sylvaine crée dans la
lenteur de la terre qui bourgeonne, de l'arbre qui s'enracine, de la
fleur qui s'ouvre lentement avec tendresse et méthode. La certitude
de la terre-mère qui enfante des êtres innombrables et des plantes
aux mœurs étranges.
Elle nous donne à voir un monde de
sérénité, d'émerveillement et de douceur, une terre avant les
hommes. Une monde végétal lumineux, aux couleurs éclatantes, un
monde de plumes et de fourrures. Nous allons feuilleter quelques
pages du livre magique de la création, au gré des créations de
notre amie peintre.
Comment ne pas voir le
sourire à la fois moqueur et émerveillé de Sylvaine dans l’œil
du tigre car je suis sûre que Sylvaine a déjà peint le tigre ou la
tigresse qui sommeille à l'ombre de ses yeux déterminés.
Le regard du singe submerge, tendresse
inquiète et interrogation, un paradis terrestre avant la femme et le
serpent.
Le carnaval des animaux de Saint Saens
pourrait agréablement accompagner notre voyage pictural. Tendons
l'oreille et écoutons-les nous raconter.
A plume ou à poil,
Nous sommes des espèces
rares qui vivons loin de vos villes. Nous existons dans des pays
lointains, inaccessibles, pays de cocagne ou pays rêvés où il fait
chaud toute l'année, où il fait bon vivre une vie heureuse dans des
contrées paradisiaques... Les touristes commencent à nous
approcher, nous les voyons arriver en meute dans des voitures
blindées, tandis que nous guettons inquiets à l'horizon.
Sylvaine nous fait
exister pour que vous nous contempliez sans vous déplacer. Je vous
connais, vous ne seriez jamais allé nous chercher, ni en zoo, ni
même dans vos revues spécialisées. Vous connaissez à peine nos
noms.
Je suis le Sury
cate, excusez moi je me laisse déborder à cause du bourdon qui
agace déjà votre œil et qui lancine à mon oreille bzz bzz bzz.
C'est insupportable, heureusement que ma fourrure est épaisse.
L'insecte ne m'intéresse pas, mais il nous amuse un moment avec son
vol lourd et insistant. Mon petit cate a essayé de l'attraper
il en a été quitte pour une pirouette dans le sable chaud.
Modestement je suis répertorié: Suricate, sentinelle du
désert et je vis en grande famille dans le sud ouest de l'Afrique.
On me nomme aussi mangouste de Namibie. Le soir je me réfugie
dans un vaste terrier collectif. Au matin comme j'en ai assez de la
collectivité je m'éloigne et me redresse pour apprendre à mon
petit à guetter à l'horizon.
Je suis la marmotte, je
vis en grande famille dans les Alpes j'appartiens au genre fouisseur
de l'ordre des rongeurs. En Amérique du nord on m'appelle le
Siffleux.
Sylvaine nous fait
voyager loin, voici le regard d'un aghoatzin d'Amérique du
Sud. Des animaux inconnus, des miracles du vivant qui jettent vers
nous un regard à la fois interrogatif et inquiet.
Nous pouvons être
troublés par notre proximité avec les animaux, parce que dans le
mystère de l'évolution, il s'en est fallu d'un poil, d'une plume ou
d'une écaille, même si parfois nous nous rêvons célestes, venus
d'une planète lointaine fils ou fille du ciel et des dieux. Notre
nature divine?
Être et ne pas être
un singe, comme le signifie Alain Prochiantz dans le titre de son
livre : Singe toi-même.
Peintures à l'huile de Sylvaine LEROY
Texte de Marie-Pierre BAYLE