Pour terminer en beauté l'exposition sur la brocante, dernière sous cette forme, aux Pénitents à Montbrison, voici un texte librement inspiré du thème. On aurait pu le lire au vernissage (s'il y en avait eu un).
On trouve de tout à la
brocante ...
De bric et de broc les
objets chantent. C'est la fête à la brocante. Les plus habitués,
au petit matin, la remorque ou le camion chargé. Arriver tôt,
chercher, s'installer à la bonne place. Déballer, sortir des
cartons : des nippes, des fringues, des ustensiles anciens un
peu étranges, plusieurs tableaux, quelques bouquins, un vieux
fauteuil, une chemise, plusieurs gandots, une lampe tempête. Tôt le
matin pour les plus habitués, regarder, fouiner, zieuter pour
découvrir l'objet rare, le plus ancien, le plus prisé. Un marathon,
entre acquérir et se séparer, vendre ou donner, pour trois fois
rien. A son goût, à sa convenance.
Objets inanimés... Des objets cultes, sacrés, que l'on approche de loin, que l'on
ose à peine toucher et des objets familiers, de table, de ménage ou
de jardin, ancrés dans le quotidien: un beau verre à pied soufflé,
une cocotte, un vieux coucou à marchander et des godasses à mettre
aux pieds.
Des objets de Musée,
des objets fétiches, des objets qui ont plusieurs vies, que l'on
achète par coup de cœur, pour l'émotion, le sentiment, le
souvenir, histoire de collectionneur amateur.
Avoir l'âme d'un
collectionneur, un peu fétiche et fétichiste en quête de vieux
grimoires ornés, enluminés sortis d'un coffre ancien caché dans le
grenier. Des croûtes, que l'on découvre sous la poussière, au
milieu des assiettes empilés, des nippes, des fringues, de vieux
chapeaux et des cartons à déballer. Des gens parlent, marchandent
et chinent . Chiner à la brocante pays d'Asie, ou d'Australie, Pays
de rien, pays perdu, pays d'Anvers, d'endroits divers. Pays de moi,
chacun pour soi, chacun le sien, de la campagne ou de la grande
ville, frusques anciennes à la valeur sûre, à côté d'objets
antiques, à arranger, à organiser, en faire tout un musée.
Ce n'est pas parce
qu'un vase un peu vieillot prend la poussière qu'il s'agit d'une
antiquité de collection. Une marchandise récente mais rare et très
demandée peut très bien avoir une valeur supérieure à une
antiquité d'une centaine d'années. Se renseigner.
On trouve de
tout à la brocante, il suffit de fouiner, d'avoir du désir,
beaucoup de désirs, d'imaginer et de rêver.
- Vous
voulez changer de corps ou vous offrir de la compagnie ? On trouve de
tout sur le marché.
Un corps
mignon de neuf euros quatre vingt dix.
Achetez
un nouveau corps à moins de dix euros. C’est le premier prix, et
vous avez le choix : un petit corps de poupée chiffon, deux
foulards roulés en boule pour les seins et un short à dentelles
pour vous tenir compagnie. Tout pour plaire à moins de dix euros.
Et vous
madame, si vous voulez un homme costaud, avec de la bonne chair dure,
moelleuse douce et bien modelée, il vous faudra mettre plus cher. Ça
peut monter à quelques millions d’euros selon la cotation de la
bourse et du passé. Il arrive même qu’un corps bien coté dépasse
les limites du marché.
Pour vous
mesdames, j’ai exceptionnellement un arrivage de corps libyens,
pour votre libido, des corps jeunes, noirs ou bronzés et même
cicatrisés. Des corps tendus, à prendre avec soi pour tenir
compagnie, se blottir et embrasser la nuit.
Je veux
un corps pour changer selon l’humeur et la bonté. Je veux un corps
d’amour pour le dimanche, avec des avantages, des opulences et même
des fioritures. Je veux un corps à moi, à prendre dans mes bras,
un corps que je promènerais en ville, qui marcherait en silence à
côté de moi. Un corps que j’aimerais. Un corps de grand bronzé à
l’allure délurée.
Et un corps
transfiguré, un corps désincarné vous avez ? Pour le récit
ce serait plus présentable!»
La
précieuse existence humaine, est difficile à obtenir et facilement
perdue. Il serait bon de pouvoir en changer. Offrez-vous le luxe de
vivre quelque temps dans un corps différent et de trouver de la
compagnie à tout moment ».
"Objets
inanimés avez-vous donc une âme qui s'attache à notre âme et la
force d'aimer! "
Texte Marie-Pierre BAYLE - Photos LE BAL DES OURSONNES
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