LE SEC ET L'HUMIDE
Sur le papier blanc
sec, résistant, une goutte aquarellée s'épanche à partir d'un
centre marqué par l’extrémité du pinceau. Vie parcellaire,
cellulaire, minuscule, chaque goutte d'eau emprisonne la lumière et
le pigment rejeté à la périphérie ne fait que révéler la
lumineuse présence, l'âme du papier.
Comme un tissu vivant
chaque cellule reliée aux autres cellules élabore ses propres
tonalités, son unique personnalité, à travers la trace aléatoire
et démultipliée du pinceau. Humide sur sec, le peintre nous relie
au mystère des origines aquatiques, à la vie matricielle et
placentaire.
«L'homme n'a pas
besoin de voyager pour s'agrandir, il porte déjà en lui l'éternité»
a écrit Chateaubriand.
A travers le BLEU
présent partout dans les aquarelles de Maryse nous entrons dans «la
silencieuse puissance de la peinture» dont parle Eugène
Delacroix.
Sieste à tous les
étages.
A l'ombre d'un arbre ou
au creux d'une chambre fraîche, par temps de canicule la sieste est
de rigueur. La sainte oisiveté des après-midi d'été qui nous
plonge dans un demi sommeil, est salutaire! Dans le sommeil profond,
y a-t-il un seul esprit qui nous emporte et nous nourrit, une seule
âme? L'esprit a-t-il revêtu la terre d'un unique vêtement? Quelle
est la couleur des songes? La quête perpétuelle du peintre! ce
quelque chose qui pense ou qui rêve dans la peinture?
L'art du tonnelier
Il ne suffit pas que le
peintre peigne en couleurs chacun de ses tableaux bleu-lumière, pour
que le miracle s'accomplisse et que le monde soit trans formé. Il
faut que l'humain besogne, coupe des bois, des planches, confectionne
des tonneaux, des avions, des sous-marins, creuse toujours plus,
qu'il s'enferme dans des laboratoires et là-haut, aille marcher
sur la lune.
Chaque peintre porte en
lui ce désir de changer le monde.L'homme en rêve! Il a lu tous les
livres, constitué d'immenses bibliothèques, il a chanté des
psaumes dans toutes les langues, peint les plus belles icônes, érigé
des tours plus hautes que celle de Babel, et des phares pour les
marins au creux des océans.
Bleu le paon
L'esprit est Bleu.
Tantôt liquide comme une mer étale, il fredonne aux flancs de la
rivière, il s'égosille dans le chant des oiseaux. Bleu somptueux la
gorge bleue du paon, l'oiseau de paradis. L'antique robe de Neptune
partout se déploie, dans l'aquarium étroit où grouille les
poissons et dans le golfe hurlant perdu en pleine mer.
Deux encoquillés
L'escargot dès qu'il
s'expose, il marche, sinon il rentre pour faire la nique aux
importuns.
Il est précieux de
pouvoir rentrer chez soi au moindre danger et de percevoir l'autre du
bout de ses antennes, des yeux globuleux. Première leçon de bave et
de marche en majesté à son petit encoquillé. Quel merveilleux port
de tête, si touchant, si lent et sur leur passage une trace
argentée, baver d'orgueil ou de colère.
Le peintre
s'approvisionne d'apparences. L'esprit en vacance a besoin de
s'encanailler, de s'amouracher, de s'enivrer, de prendre des
nageoires et d'escalader.
Ville bleue
Pluie diluvienne, un
rideau serré de lignes verticales, intense entre le haut et le bas.
Une pluie de supermarché pour grande ville habitée, pluie de place
Vendôme. Le bleu nostalgique nous tire vers le passé, un peu
pollué. Pluie ordinaire de jour de rentrée, parapluies de saison,
pour tout nettoyer et recommencer. Pas d'arbres, aucune végétation
pour retarder la chute. N'allez pas chercher l'esprit à la campagne.
La ville est bleue de pollution mais saturée de vie, les esprits
sont en travail, en confrontation, en gestation. L'esprit a quitté
la montagne et déserté les sommets, il s'est ramassé bien vivant
au cœur des villes surpeuplées. Une densité propre à une
gestation nouvelle. L'esprit toujours un peu bleu.
Encre noire,....le
retour
A travers mes racines
tordues, c'est la multitude des méandres de la vie qui se cherche,
se démultiplie, se perd et se régénère. Majestueux retour à la
poussière.
Les racines fascinent
l’œil du photographe ou du peintre, monde souterrain, monde
occulte mis à jour, mis en lumière, sorti de son contexte. De
belles lignes graphiques les racines!. Où sont celles des humains?
Dans la tête? Les pieds n'arrêtent pas de bouger, les mains aussi.
Peindre ou écrire
c'est l'errance. L'esprit, c'est l'errance, il souffle où il veut,
mais Qui veut!
Y a-t-il une volonté.
L'Esprit dit : tu iras où tu voudras, tu parcourras les hivers, les
mers et la terre des hommes
sous la pluie, au soleil, au sommet du phare de tes illusions,
jusqu'au fin fond de tes océans et tu ne me trouveras pas. Pars, va
errer dans les villes des hommes, puis concentre-toi sur l'ouvrage à
accomplir, sur ton dessin, sur ta toile à réaliser, à dessein,
alors l'apaisement, le bonheur, puis la Joie arrivent.
Aquarelles Maryse CORTIAL
Texte Marie-Pierre BAYLE
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